Diagonale Strasbourg – Perpignan 2008

Délit de grande distance !

 

De la lecture pour les vacances à consommer avec modération. Attention  l’abus peut être dangereux.

« A lire en diagonale »

 

He oui cette histoire devait forcément mal se terminer et c’est au commissariat de police  de Perpignan  que l’individu a été récupéré par Régine et Pierre Serre, partenaires du club vélo.

Il faut dire qu’elle avait mal commencé, puisque c’est au commissariat de Strasbourg que l’on retrouve sa trace.  En  liberté conditionnelle de 78h, il a profité de cet instant pour s’éclipser et rouler vers la liberté après avoir fait tamponner son carnet de route. Mais elle aurait pu tourner court puisque un mal de dos tenace, laissait planer des doutes sur la possibilité de son départ et sans jeu de mots, on peut dire qu’il avait mal au bas reins (Rhin)67

 Il enfourche son vélo, équipé de ses sacoches pour être en autonomie complète et ainsi respecter les règles et l’esprit des Diagonales. Départ le lundi 7 juillet à 9h30 de Strasbourg, il prend la clef des champs et la route de Perpignan distante de 1000km.

Il bénéficie tout au long du parcours de complicité pour la réussite de sa cavale (le transport jusqu’à Strasbourg, l’hébergement du Week-end à Mulhouse, le repas à Sardieu, un bout de route avec les copains à la Cote, et la récupération à Perpignan.)

 

Lundi 7 juillet 2008 :

Afin d’éviter la circulation et de se faire repérer,  il emprunte la piste cyclable le long du canal Rhin Rhône pour rejoindre Rhinau et poster une carte pour justifier le démarrage de ce périple. Puis il circule sur la petite route bordant le Rhin, avant de bifurquer à Neuf-Brisac direction Wittelsheim, lieu du prochain contrôle. Le vent du sud,  sud /ouest  ralentit sa progression dans cette plaine d’Alsace, mais les kilomètres et les paysages défilent quand même. Accueil sympathique avec fan club  et dernier coucou au pointage de Wittelsheim au café à l’Orée du Bois, coca offert par le patron un ancien sportif de haut niveau, puis direction Etupe, en utilisant une petite route et les berges du canal où le vent a augmenté en intensité. Arrêt au café d’E(s)tupe où le contrôle n’a rien donné, seule la prise d’un coca cola a pu être constatée par les consommateurs qui eux étaient sous pression et se faisaient mousser. Direction le plateau du Jura et Morteau, le terme de cette étape en escaladant à partir de St Hyppolite la rampe qui conduit à Maîche pour allumer cette dernière partie où la chaleur fait défaut. C’est loin d’être plat le plateau, succession de bosses avant d’attaquer la descente sur Morteau et rejoindre l’hôtel pour une nuit réparatrice. Les 240km écoulés l’ont rapproché de l’objectif, il ne lui reste plus que 760km à faire. L’absence de Gégé dans ce périple lui  a permit de se ravitailler le soir au kébab du coin. De faire le plein de frites  en essayant de la garder pour la suite du programme puis dodo à l’hôtel.

 

 

Mardi 9 juillet 2008.

Départ matinal à cinq heure trente, tout est calme dans l’hôtel, il retrouve sa monture dans le hall, mise en place des sacoches et de l’éclairage, pour affronter la nuit du petit matin. Il a plu durant la nuit et la chaussée est mouillée. Il quitte Morteau direction Pontarlier, il longe les berges du Doubs, la pente est raisonnable et agréable c’est une bonne mise en jambes, mais la pluie s’invite à la sortie, les premières lueurs du jour ont du mal à percer, le plafond est bas, le moral dans les chaussettes qui elles sont trempées, mais pour l’instant, il ne fait pas froid. Un petit déjeuner à Pontarlier où la boulangère ne lui donne pas de bonnes nouvelles sur l’évolution du temps. Faut-il garder le cap ou bien prendre la direction de Champagnole? Tant pis il garde le cap direction Mouthe, ville réputée pour la clémence de son climat et la douceur de ses hivers, pourvu qu’il ne neige pas là-haut !  Mais non, la pluie s’arrête un peu avant la ville, un petit arrêt est le bienvenu pour se faire sécher et prendre une boisson chaude. Il repart et  passe le col avant de redescendre sur Foncine et de remonter sur St Laurent de Granvaux,  objet d’un nouveau contrôle et arrêt dans un bar. Une surprise l’attend au redémarrage, pneu avant à plat, première crevaison du périple. Il faut réparer avant de repartir, mais d’après le patron du bistrot ça descend tout le long pour aller à St Claude. Fort de ce renseignement, il redémarre le cœur joyeux  et plein d’allant, vite tempéré par la première pente. Il n’est pas au bout de ses peines, car 10km plus loin, la route qui devait descendre est barrée, déviation obligatoire et le toboggan continue, avant d’aborder une descente qui le conduit un peu en aval de St Claude. Là, il retrouve la nationale et son trafic, belle route large avec bande cyclable jusqu’à Dortan. Abandon sans regret de la nationale pour une petite route des gorges de l’Ain où la beauté et la tranquillité lui font oublier qu’il pédale pour avancer. Et voilà Poncin, son contrôle et son coca cola au Café des Sports, bourgade tranquille et paisible des ventres jaunes. Encore 100 bornes et il sera chez lui, le vent a tourné au nord, ce qui va lui être favorable pour le reste du parcours. Ambérieux est traversée sans encombre, même si une petite erreur de trajet rallonge un peu le parcours programmé, puis c’est au tour de Lagnieu  avec le franchissement du Rhône et bonjour l’Isère. Une bouffée d’oxygène  l’envahit et le stimule, les kilomètres jusqu’à Cremieu sont avalés à vive allure, un regard rapide sur les halles et des souvenirs qui se bousculent dans sa tête, sacrée soirée des ex futurs. Il lui a semblé voir encore des volutes de fumée qui s’échappaient et entendre les détonations qui les accompagnaient (mais à la lecture tout le monde ne peut pas comprendre). Bourgoin se profile à l’horizon, entrée de ville avec son flot de véhicules et c’est un nouveau pointage, puis le départ pour la fin du trajet. Ses copains du club devaient être là pour l’accompagner sur les kilomètres restants, mais il est en avance sur ses prévisions, il les retrouvera plus loin sur la route. La sortie de Bourgoin est en pente et la rencontre se fait presque au sommet de la bosse un peu avant Meyrieu les Etangs. Joie des retrouvailles et complicité retrouvée, plaisir partagé de pédaler ensemble, participation collective à une réussite personnelle, merci les amis pour ce témoignage d’amitié.

Direction la Cote St André par les bois de Commelle et voilà 300 km supplémentaires qui le rapproche d’avantage de Perpignan.

 

 

 Rendez vous chez Colette et Gégé pour l’apéro et le repas, petite modification de la sacoche avant, puis dodo à la maison.

Mercredi 9 juillet 2008.

Départ à 6h après avoir bu le café chez Gégé. L’équipe est au rendez-vous, enfin ceux qui peuvent car pendant qu’il roule d’autres travaillent encore, ils ne sont pas tous à la retraite dans ce club! Première montée et difficulté dans les Chambarans, c’est de bonne heure et déjà difficile, je dirai même c’est Tho-dur, ce n’est certainement pas le parcours le plus facile pour rejoindre Romans et trouver chaussure à son pied. Un petit tour à la boulangerie, un  petit café, un morceau de Pogne et Patrick fait demi-tour à Romans. Le reste de l’équipe va l’accompagner jusqu’à Chabeuil. Mauvaise remarque de sa part sur la moyenne matinale et voilà qu’ils embrayent, c’est plat, le vent n’est pas trop fort, ça avance rapidement, il va être cuit pour le reste du trajet. Au revoir Gégé, Jacques et André et merci de l’avoir accompagné. Ils se quittent à Chabeuil, et ce qu’il n’a pas dit, c’est qu’il avait une douleur au genou et qu’il était inquiet pour la suite, mais heureusement en retrouvant un rythme moins soutenu la douleur a disparue dans la matinée. Direction Loriol par les chemins de traverse, avec une petite erreur de navigation et un passage par Upie, puis traversée du Rhône pour un pointage au Pouzin. Il fait beau et chaud, la N86 pour descendre jusqu’au Teil est agréable avec des passages ombragés, il n’y a pas beaucoup de circulation, la descente s’effectue sur un bon rythme mais sans piocher dans les réserves.

Et voilà, à partir du Teil il va falloir remonter sur Villeneuve de Berg, il y a un peu plus de circulation et le vent est légèrement défavorable mais la montée se fait sans problème. La place de Villeneuve est animée, beaucoup de monde au marché. Direction Vallon Pont d’Arc en suivant la vallée et l’Ibie. Paysage magnifique, calme et reposant, chant des premières cigales,  le rêve pour tout cyclo, lorsque celui-ci rentre en harmonie avec son environnement immédiat, qu’il se confond avec lui, et qu’ils ne font plus qu’un. Vallon Pont d’Arc et ses touristes, courses sans le jeu au casino local, pour un déjeuner tardif pris sur la grande place à l’ombre des platanes. Il faut repartir, la journée n’est pas finie, franchissement de l’Ardèche direction Barjac, ça monte rapidement, il fait chaud, il cherche les coins d’ombre, ne pas s’affoler, prendre son temps et un développement approprié. Il en viendra à bout de cette montée! Il en a connu des plus difficiles, lui parler, la caresser dans le sens de sa progression, l’effleurer, l’enlacer du bout du pneu, entrer en communion avec elle, déjà elle devient plus douce, plus compréhensive, encore un petit effort elle se fera plate, voire même elle inversera sa pente pour lui être agréable et c’est déjà Barjac. Pas le temps de faire des discours, la route continue, serpente et s’élève sous la chaleur, direction Salindre pour un nouveau pointage. Il s’effectue au garage Renault, accueil sympa. Il a droit à un rafraichissement, menthe à l’eau, et cœur grenadine, qui pour l’instant continue de ronronner tranquillement. Ce n’est pas le moment de couler une bielle même si le dépannage pourrait se faire sur place. Il repart, Ales n’est plus loin et la route n’est pas difficile, il faut contourner la ville par la rocade où la circulation est importante, puis c’est St Christol les Ales.

Il faut rester vigilant pour la navigation, là il faut récupérer la D 24 et prendre la direction de Quissac, jolie petite route tranquille.

De Quissac à Valflaunèse la route s’élève de nouveau, le vent du sud qui vient de la mer apporte une bonne nouvelle pour la proximité de celle-ci, mais freine l’avancée de celui qui pédale. Valflaunèse  Pic St Loup, récompense suprême, concerto pour un cyclo, les cigales en rafale, s’égosillaient à l’unisson, stimulant de leur chant, cet inconnu pédalant. Au sommet arrêt photo du pic, puis descente sans appel (puisque nous sommes le 9 juillet) sur St Martin de Londres. A la sortie du village, il faut monter sur le plateau et faire sa traversée, direction Aniane, super descente et l’on retrouve l’Hérault qui lui, n’est pas fatigué. En suivant son cours de plus ou moins loin, il l’emmènera en passant par Gignac jusqu’à Montagnac, terme de cette étape de 340 km. Et oui, il en faut de la « gnac » pour avancer.

Le pointage se fait à la brasserie des Sports sur la place du village où la fête bat son plein, quel contraste après ces heures passées dans le silence. Il est de retour à la civilisation, les festivités précédant la fête du 14 juillet ont commencées. Il trouve un hôtel à la sortie du village direction Meze pour une nuit de repos avant d’affronter la dernière journée  de cette cavale. 

Jeudi 10 juillet 2008.

Un  nouveau départ matinal pour la dernière étape de ce périple. Il allume son éclairage, puis remet la machine à pédaler en route. La nuit, le silence, ou plutôt les bruits de la nuit, l’aube qui se lève alors que lui  cherche à composer une « Ode »Aude (11) à l’aurore  qui pointe, et se rapproche. Arriver à la mettre en musique, trouver les bonnes notes, l’inscrire entre les lignes, la porter au plus haut, ne pas pousser de soupir, ne pas mettre de bémol, avoir la bonne clé, garder le bon tempo, et composer sur son vélo, sur un rythme d’adagio, un concerto pour cyclo, sans aide d’EPO. Mais avant il faut passer Pezenas, cité où Molière a résidé, la ville est calme et n’est le théâtre d’aucune manifestation de piscénois. Puis direction Béziers par la nationale 9, il est surpris du peu de trafic, mais il est encore tôt. Ballade dans la ville pour trouver un café, et prendre le petit déjeuner, mais rien ne lui convient, il continue son chemin, laisse dormir ces citadins, sûr de trouver un festin dans le café à machin, car tel était son destin, et ainsi satisfaire sa faim. Enfin voilà Narbonne et l’Aude qui se sépare de son aube aux premiers rayons de soleil. Un petit déjeuner à la terrasse d’un café, et une pensée pour St Pierre la Mer tout proche, où cet après midi il pourra se reposer. La traversée de la ville se passe sans soucis même s’il faut parfois demander son chemin et prendre les grands boulevards, les indications au centre ville ne sont pas toujours très évidentes pour un cyclo. Mais la direction de Perpignan apparait de nouveau, il passe sous l’autoroute de Toulouse direction Sigean et sa réserve Africaine. Une petite erreur de parcours au niveau du giratoire et il ne longe pas l’étang de barges, pourtant c’est un endroit qui lui était plutôt destiné comme dirait un mickey de sa connaissance, il reste sur la nationale. Port la Nouvelle, porteur de bonne nouvelle puisque Perpignan, terme de cette ballade se profile à l’horizon. Il poste la carte qui indique que son  périple se termine, et qu’il est allé au bout de ce challenge. Un petit coup de téléphone, Pierre et Régine sont en route pour le récupérer, il les retrouve un peu avant Port Leucate, où un petit arrêt est le bienvenu pour se sustenter avant d’affronter la dernière ligne droite pour Perpignan. A Port Leucate il ne prend pas  la direction de la plage des hommes nus pour prendre un bain de jouvence, mais il continue, Port Barcarès, puis Canet et enfin Perpignan.

 

C’est gagné enfin presque puisqu’il faut maintenant trouver le Commissariat de Police pour faire tamponner le carnet de route. Contrairement à Pierre, lui n’a pas de GPS et c’est un peu le parcours du combattant dans la ville par rapport aux travaux et aux déviations mises en place, mais après un périple dans la ville et les renseignements pris au hasard des piétons, il arrive enfin au commissariat. Accueil sympa et photo d’arrivée. Régine et Pierre garderont certainement un souvenir particulier d’une personne qui a débarqué du hall pour leur interdire de prendre une photo du bâtiment. 

C’était la bonne année pour tenter l’aventure, après une préparation sérieuse et une  bonne motivation la réussite était au bout du chemin.

Merci à vous tous qui avez participé à la réussite de ce challenge, par votre soutient, votre aide et vos encouragements

En conclusion :

L’idée de faire une diagonale était dans ma tête depuis bien longtemps.

Une diagonale c’est simplement le fait de relier deux coins de France à bicyclette à la force du jarret, sans assistance et en autonomie totale. On ne peut compter que sur soi- même.

Après avoir préparé son parcours, fixé ses étapes, donné les temps de passage, il faut l’envoyer pour validation  à l’Amicale des diagonalistes qui gère ces randonnées sous l’égide de la FFCT.

Les diagonales font partie des randonnées longue distance de la FFCT qui privilégient l’esprit randonneur.

Une diagonale peut se faire seul ou à plusieurs, maximum 6 personnes.

Strasbourg- Perpignan est la plus récente des diagonales, elle doit être réalisée en moins de 78 heures pour une distance moyenne de 940km. Mon parcours établi sur la base de 1000 km  en a comporté en réalité 1025km.

Pour ma part le fait de rouler seul sur une longue distance ne me pose pas de problème particulier, à l’écoute de mon corps, j’adapte mon rythme, ma vitesse et mes arrêts. Durant ce périple, pas  d’état d’âme particulier, une réflexion sur soi même, un échange permanent d’idées, la découverte incessante des changements de paysages au cours des kilomètres et chaque jour, un nouveau challenge pour rejoindre l’étape suivante.

Pas de secret pour la réussite de ce challenge, pas de capacité exceptionnelle, seulement l’envie d’aller un peu plus loin, de reculer un peu ses propres limites. Mais pour mettre toutes les chances de son côté, il faut se préparer sérieusement et rouler régulièrement. Comme le dit Marc, ce n’est pas la distance qui fait échouer mais la vitesse à laquelle elle est parcourue. D’où cet adage  connu : «  qui veut voyager loin ménage sa monture ». Le mental a aussi son importance lorsque les jambes ne veulent plus tourner et appuyer sur les pédales, il faut que la tête prenne le relais pour que la machine continue d’avancer vers le but fixé.

Aventure magnifique pour tous les amoureux de la petite reine et des longues distances. En espérant que ce petit compte-rendu donnera envie à un grand nombre de tenter l’aventure.

La prochaine peut être ?  Brest Menton en 2009  avis aux amateurs.

 

Diagonalement votre et à bientôt

Maurice